Au Canada, près de 5.5 millions de personnes souffriront de dépression au cours de leur vie. Parmi elles, 1.6 million ne trouveront aucun soulagement avec les traitements conventionnels.
La dépression résistante aux traitements nécessite de nouvelles options et des recherches approfondies pour permettre aux patients de reprendre leur vie en main.
Marion Beckett sait combien il est important d'avoir accès à de nouveaux traitements pour les maladies mentales. Ancienne infirmière, Marion souffre de dépression depuis toujours. « Mon histoire avec la santé mentale a commencé il y a très, très longtemps », se souvient-elle.
Ses deux parents souffraient de maladie mentale — son père n'a été diagnostiqué qu'après sa retraite et sa mère n'a jamais reçu de diagnostic officiel.
Marion n'a été diagnostiquée officiellement qu'au début de la trentaine. À cette époque, elle travaillait comme infirmière en cardiologie dans un hôpital d'Ottawa. Le stress lié à son travail, venu s'ajouter à ses difficultés personnelles, a finalement provoqué une dépression nerveuse qui a nécessité son hospitalisation.
Il leur a fallu deux ans pour trouver un médicament efficace. Marion se souvient de cette période sombre comme d'une expérience désespérée et épuisante.
L'équilibre est essentiel mais difficile à maintenir.
Les effets secondaires des médicaments contre la dépression sont très fréquents. Parmi ces réactions indésirables, on peut citer la prise de poids, l'insomnie, les nausées ou la fatigue, autant de symptômes qui, en plus de la dépression, peuvent nuire à la qualité de vie. L'un des défis du traitement des troubles mentaux est de trouver un médicament efficace présentant un minimum d'effets secondaires.
Marion et son équipe soignante ont finalement trouvé un médicament qui correspondait parfaitement à ses besoins.
« Ce n’était pas une solution miracle, loin de là, mais je me sentais mieux qu’avant, et ça allait », explique Marion. « Ça me convenait. J’étais beaucoup plus fonctionnelle. »
Grâce aux médicaments et à la thérapie, son état s'est stabilisé jusqu'à une seconde crise de santé mentale début 2019. Une série de tragédies personnelles a entraîné une nouvelle hospitalisation. L'hôpital Royal était le seul de la région capable de lui apporter un soutien vital. Ce fut une période éprouvante.
« Il a fallu un mois rien que pour me remettre sur pied », raconte Marion. Mais son traitement ne s'est pas arrêté là. Son équipe soignante a vu en Marion une personne qui pourrait grandement bénéficier d'un projet de recherche au sein de l'organisation.
Cette fois, Marion s'est vu offrir la possibilité de participer à une étude clinique portant sur la kétamine, un anesthésiant largement utilisé depuis des décennies. Récemment, grâce à des recherches novatrices menées au Royal Hospital, ce médicament s'est révélé être un traitement efficace contre la dépression.
Une percée potentielle issue de la recherche royale
L’eskétamine, administrée par voie nasale sous surveillance médicale, a été approuvée par Santé Canada en 2020. Elle cible des voies neuronales spécifiques et stimule la capacité du cerveau à établir de nouvelles connexions, favorisant ainsi la guérison de la dépression. Elle peut réduire rapidement les symptômes dépressifs et les idées suicidaires chez les patients n’ayant pas répondu aux autres traitements médicamenteux couramment prescrits.
L’Hôpital Royal est un chef de file mondial dans ce domaine de recherche. Les premiers essais cliniques sur la kétamine comme traitement de la dépression au Canada ont été menés à l’Hôpital Royal, sous la direction du Dr Pierre Blier, qui étudiait les effets de la kétamine sur la dépression depuis 2010. Les résultats de ces travaux ont été publiés en 2019 dans l’American Journal of Psychiatry.
« La découverte des effets antidépresseurs de la kétamine a été saluée comme l'une des plus grandes avancées dans le domaine de la dépression au cours du dernier demi-siècle », déclare le Dr Jennifer Phillips, auteure principale et directrice scientifique du Royal.
« Les recherches ont démontré que l’eskétamine est plus efficace que les médicaments conventionnels chez un plus grand nombre de patients souffrant de dépression, et ce, beaucoup plus rapidement. Ainsi, des personnes qui n’ont pas répondu à d’autres traitements, parfois depuis plusieurs années, pourraient réagir à celui-ci », explique Phillips. « L’eskétamine est encore récente ; nous passons des essais cliniques menés en milieu de recherche à la pratique courante. Nous cherchons à savoir : à qui ce traitement est-il le plus efficace ? Comment pouvons-nous l’utiliser pour maximiser et prolonger ses effets ? Et comment l’associer aux thérapies antidépressives que nous utilisons déjà ? »
La recherche aide plus rapidement les patients.
En tant qu'hôpital universitaire et de recherche, le Royal peut intégrer la recherche directement aux soins des patients. C'est un élément clé de la Clinique innovante BMO pour la dépression, qui propose des traitements novateurs fondés sur les dernières avancées scientifiques. Non seulement cela améliore la prise en charge des patients, mais cela crée également un environnement propice à la recherche pour répondre à des questions importantes concernant l'eskétamine.
Le traitement de Marion a débuté en mai 2022 et s'est terminé en janvier 2023. Elle explique que si ses autres médicaments l'ont maintenue dans un état stable, l'ajout d'eskétamine à son plan de traitement a été la pièce manquante du puzzle.
« La façon dont mon cerveau traite les informations a complètement changé », explique Marion.
Elle ne se considère plus comme une simple gestionnaire ; elle a retrouvé sa vie.
Marion espère que la création de cette clinique incitera d'autres donateurs et de grandes organisations à apporter leur soutien à des initiatives similaires en matière de santé mentale : « Il faut vraiment du leadership pour soutenir une cause qui est encore si stigmatisée », déclare Marion.
Le 30 mai 2023, BMO a annoncé un don de 2 millions de dollars pour la création de la Clinique novatrice BMO pour la dépression à l’hôpital The Royal. Cette clinique offre de nouvelles options de traitement, développe des possibilités de recherche et facilite l’accès à d’autres traitements et services offerts à The Royal.
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