Vous devez résoudre un problème? Une nouvelle étude montre que la meilleure solution est de dormir

Beaucoup d’entre nous ont fait l’expérience de se coucher après s’être débattus avec un problème, puis de trouver la réponse comme par magie en se réveillant le lendemain. Comme le décrit avec éloquence l’écrivain John Steinbeck : « Il est courant de constater qu’un problème difficile la nuit est résolu le matin après que le comité de sommeil y a travaillé ».

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Dr Stuart Fogel
Dr.Stuart Fogel, chercheur en neurosciences cognitives et directeur de la recherche en neurosciences du sommeil à l’Institut de recherche en santé mentale du Royal affilié avec l’Université d’Ottawa

Un article publié par le Dr Stuart Fogel et son équipe dans le numéro d’août 2021 de Cerebral Cortex examine de plus près les effets du sommeil sur la résolution de problèmes.

Le Dr Fogel est chercheur en neurosciences cognitives et directeur de la recherche en neurosciences du sommeil à l’Institut de recherche en santé mentale du Royal affilié avec l’Université d’Ottawa. Il est également professeur à l’École de psychologie de l’Université d’Ottawa et membre de l’Institut de recherche sur le cerveau de l’Université d’Ottawa. Ses recherches portent sur le rôle que joue le sommeil dans l’apprentissage, la mémoire et les fonctions cognitives.

Le Dr Fogel explique que les recherches suggèrent que le sommeil est essentiel à l’apprentissage et à la mémoire, et qu’il contribue plus particulièrement à la consolidation de la mémoire, un aspect essentiel de l’apprentissage de nouvelles informations. Lorsque nous apprenons quelque chose de nouveau, il s’agit d’un souvenir récent. Les souvenirs récents sont fragiles et vulnérables aux interférences, c’est-à-dire qu’ils sont faciles à oublier, jusqu’à ce qu’ils soient « renforcés » et intégrés dans la mémoire à long terme. Selon le Dr Fogel, « le sommeil peut être un moment opportun pour faciliter le transfert actif d’informations vers d’autres zones du cerveau pour les conserver de manière plus permanente ». 

Certaines des idées les plus brillantes de l’histoire seraient nées après une bonne nuit de sommeil, notamment la théorie de la relativité d’Albert Einstein, le tableau périodique des éléments de Dimitry Mendeleev, la découverte de l’insuline par Frederick Banting, la compréhension de la structure de l’atome par Niels Bohr et l’inspiration de Larry Page pour Google. Alors, est-il vrai que lorsque nous avons un problème, le fait de dormir peut nous aider à le résoudre?

Pour répondre à cette question, l’équipe du Dr Fogel a recruté des volontaires pour résoudre une version informatisée d’un jeu appelé la Tour de Hanoï. 

Ce jeu se compose de trois tiges et de cinq disques de taille décroissante qui sont empilés sur l’une des tiges, le plus petit disque se trouvant au sommet. Le but est de déplacer toute la pile de disques vers la troisième tige, un disque à la fois. Il est important de noter que les contraintes du jeu obligent les participants, par une procédure d’essais et d’erreurs, à employer une logique et une stratégie complexes dont ils ne sont pas explicitement conscients pour résoudre le problème (regardez cette vidéo pour voir la solution).

Les volontaires de l’étude ont été divisés en trois groupes : sommeil, sieste, et éveil. Chaque groupe a participé à une séance de formation au cours de laquelle ils ont eu l’occasion d’apprendre la stratégie nécessaire pour résoudre l’énigme de la Tour de Hanoï pendant qu’ils subissaient une scintigraphie cérébrale dans l’appareil d’IRM.

Cette formation a été suivie soit d’une séance de sommeil (huit heures, pendant la nuit), soit d’une sieste de 90 minutes pendant la journée, soit d’une période d’éveil de huit heures pendant la journée.

Les ondes cérébrales des participants ont été mesurées pendant leur sommeil. « Les ondes cérébrales pendant le sommeil sont très distinctes de celles de l’éveil, il se produit des événements que nous pouvons mesurer dans ces traces d’ondes cérébrales et dont nous savons qu’ils sont importants pour les processus de la mémoire et la résolution de problèmes », explique le Dr Fogel. « Nous pouvons donc les rechercher, les mesurer, et déterminer s’il s’agit d’indicateurs clés sur les bons processus de mémoire. »

“Sleep is not just helpful, but it seems to be critical in solving problems,” says Dr. Stuart Fogel, a cognitive neuroscientist and the director of sleep neuroscience at The Royal’s Institute of Mental Health Research affiliated with the University of Ottawa.

Les participants appartenant au groupe de sommeil étaient plus rapides et plus précis lorsqu’ils ont dû exécuter de nouveau le jeu de la Tour de Hanoï par rapport aux participants du groupe d’éveil, ce qui suggère que le sommeil facilite et améliore le processus de consolidation de la mémoire. Fait important, les scintigraphies cérébrales de l’appareil d’IRM ont montré un renforcement de la trace cérébrale spécifique à la mémoire de l’apprentissage de la solution du problème. Ce renforcement était le plus significatif chez les participants qui avaient dormi pendant l’intervalle de rétention.

« Le sommeil n’est pas seulement utile, il semble être essentiel à la résolution de problèmes », ajoute le Dr Fogel.

« Lorsque vous êtes exposé à ce problème en utilisant l’approche d’essais et d’erreurs, vous finissez par y arriver, mais si vous avez une période de sommeil avant, il en résulte ce moment d’illumination où vous êtes tout à coup capable de résoudre ce problème que vous ne pouviez pas résoudre avant de dormir. »

La sieste a également été perçue comme ayant des effets positifs chez certains participants, mais des recherches supplémentaires sont nécessaires.

L’étude montre que le sommeil participe activement à la formation de nos souvenirs et favorise une bonne santé mentale et cognitive. 

« Le sommeil représente une cible thérapeutique possible qui est nouvelle et assez puissante, ce serait même peut-être la fontaine de jouvence », indique le Dr Fogel. « J’espère que les gens feront du sommeil une priorité dans leur vie. C’est un aspect essentiel d’un mode de vie sain. »